Sommeil, santé & bien-être

Les seniors ont-ils un meilleur sommeil ?

Ouns

31 janvier 2022

Comment notre sommeil évolue-il au fil du temps ? Dort-on mieux ou moins bien, une fois retraités ? Décryptage.

Avec l’âge, de nombreux paramètres de nos vies changent, et le sommeil en fait partie. « Lorsqu’on avance en âge, on fait moins de sommeil profond que lorsqu’on est jeune, et cela fait partie des modifications physiologiques liées au vieillissement » explique le docteur Pascale Ogrizek, spécialiste du sommeil. Avec le temps, ce sommeil profond, pourtant essentiel à une nuit réparatrice, se réduit au profit d’un sommeil plus léger, «si bien que les personnes âgées auront l’impression, et c’est une réalité, de se réveiller plus souvent». Avec un sommeil plus léger, on devient plus sensible à notre environnement, et un simple bruit ou un changement de température peut suffire à nous réveiller. Les épisodes de réveils intra-sommeil sont donc non seulement plus nombreux, mais aussi plus longs. Au matin, on a cette désagréable sensation d’une nuit saccadée, de mauvaise qualité et non réparatrice.

Changements dans le rythme du sommeil

Si la qualité du sommeil se modifie, le rythme aussi. Pour les seniors, les activités physiques et sociales ont tendance à se raréfier, « or, plus on est actif, plus la pression de sommeil sera importante, et mieux on dort », précise le Dr Ogrizek. Une baisse d’activité qui pousse également nombre de personnes âgées à avancer leur heure de coucher. L’endormissement est plus précoce, et le réveil arrive alors plus tôt dans la matinée. « Souvent on voit en consultation des personnes âgées qui sont seules, qui s’ennuient, qui ne savent pas comment s’occuper, alors elles vont se coucher tôt ». Si on s’endort à 20h, et qu’on se réveille à 4h du matin, on aura eu ses 8h de sommeil, « mais en se levant si tôt sans réussir à se rendormir, puisqu’on a fait la durée nécessaire, certaines personnes âgées ont l’impression de souffrir d’insomnie alors que leur sommeil est simplement décalé », détaille le docteur Ogrizek. Les personnes dans ce cas vont alors sortir du lit vers 7h, en ayant eu l’impression d’avoir mal dormi, alors qu’en réalité elles ont eu leur quota de sommeil. Une baisse de stimulation pendant la journée, et un sommeil perturbé le soir, poussent certains seniors à multiplier les siestes. Ce qui n’aide pas à la régulation du sommeil la nuit, puisqu’ils «prennent de l’avance sur leur temps de sommeil. Une fois qu’on a couvert ses besoins, on n’a plus envie de dormir, insiste le Dr. Ogrizek. On se couche tôt, donc on va se lever à 4h du matin, passer 3h au lit sans réussir à se rendormir, on a l’impression d’avoir mal dormi donc on est fatigué, on ne fait pas d’activité, on fait des siestes pour essayer de récupérer en journée et c’est un cercle vicieux ».

Des maladies sources d’éveil

La diminution de l’activité physique est bien souvent causée par des maladies rhumatologiques, et « ces personnes ont mal, ce qui ne va pas les encourager à être actifs. Cette douleur peut également être une source d’éveil ou de mauvais sommeil dans la nuit » souligne la spécialiste. D’autres maladies apparaissent avec l’âge. La nycturie, le fait de se lever plusieurs fois par nuit pour faire pipi, ou l’énurésie qui pousse certains à uriner au lit, sont des pathologies fréquentes chez les séniors. Elles peuvent engendrer des réveils récurrents pendant la nuit, et le rythme d’endormissement s’en retrouve alors impacté. L’apnée du sommeil est également un syndrome plus souvent relevé chez les séniors, puisque d’après l’Inserm près de 30% des plus de 65 ans sont concernés. « Ce sont des arrêts de la respiration de quelques secondes pendant qu’on dort, et qui vont venir perturber la bonne qualité du sommeil. La personne se réveille avec l’impression de ne pas avoir récupéré, que sa nuit n’a servi à rien, parfois avec des maux de têtes, et de la somnolence dans la journée. Souvent, avec l’apnée du sommeil, les gens transpirent beaucoup la nuit, avec un sommeil agité », précise le Dr. Ogrizek.

 

Avec l’âge les maladies peuvent parfois s’accumuler, les traitements aussi, et certains médicaments peuvent perturber la qualité des nuits. A l’exemple des corticoïdes, rappelle la spécialiste, « ils sont stimulants, un peu excitants pour l’organisme, et les gens qui sont sous corticoïdes ont souvent du mal à dormir. Les bêta-bloquants peuvent aussi stopper la sécrétion de la mélatonine, l’hormone du sommeil. Certains diurétiques peuvent donner envie de faire pipi et donc de se réveiller pendant la nuit pour aller aux toilettes. Certains antidépresseurs peuvent également être stimulants et empêchent un peu de dormir, mais surtout ils augmentent le risque de chutes qui est déjà fréquent chez les personnes âgées. C’est pour cela qu’en tant que spécialiste du sommeil, on déconseille les anxiolytiques et somnifères, ou alors dans des cas particuliers, sur de très courtes périodes ». La dépression peut également jouer un rôle dans notre sommeil, et l’aspect psychologique n’est jamais bien loin au moment du coucher, comme le raconte le Dr. Ogrizek, « la solitude fait que la nuit, les gens ruminent, pensent à des choses tristes, ils ne sont pas sereins et détendus au moment de dormir. A côté de cela, il y a aussi des séniors qui dorment beaucoup mieux car ils sont à la retraite, n’ont plus le stress du travail ou de se lever le matin ».

Une bonne hygiène de vie adaptée à l’âge

Avec cette baisse d’activité, les personnes âgées sortent souvent moins, et sont alors moins exposées à la lumière naturelle, « elle joue pourtant un rôle très important dans la régulation de l’horloge biologique » souligne le Dr.Ogrizek. C’est en effet grâce à cette lumière du soleil que notre cerveau régule ses heures de lever et de coucher, mais aussi la sécrétion de certaines hormones qui vont nous permettre ou non de dormir. Avec l’apparition de maladies oculaires comme la cataracte, elles peuvent diminuer le passage de la lumière qui arrive jusqu’à la rétine. La spécialiste conseille ainsi « d’avoir un rythme de vie avec un rituel. Se lever le matin à heure fixe, ouvrir les volets ou les rideaux dès le réveil pour s’exposer à la lumière du jour le plus possible. Sortir un peu pour marcher, avoir une activité physique et prendre la lumière ». L’utilisation des écrans est évidemment déconseillée avant de dormir car ils freinent la sécrétion de mélatonine. S’il faut prendre un maximum de lumière le jour, une chambre dans le noir total est recommandée pour favoriser un bon sommeil.

 

L’hygiène de vie, peu importe l’âge, impacte notre sommeil. L’alimentation en fait partie ! Le Dr. Ogrizek rappelle d’ailleurs que « les protéines stimulent la vigilance, donc on conseille d’en consommer plutôt le midi. Alors que les sucres favorisent la somnolence, et sont donc à manger plutôt le soir ». La consommation d’alcool, de café, de thé, ou de cigarette est à proscrire le soir. L’activité physique comme la gym douce ou le yoga peut également aider à rejoindre les bras de Morphée. En général, le sport est déconseillé le soir, « mais pour les personnes âgées cela peut être intéressant pour retarder l’heure du coucher tout en gardant une activité physique », explique le docteur. Et au moment de dormir, une literie de qualité est évidemment primordiale pour un sommeil apaisé.

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